La participation à une compétition sportive, ou l’exercice d’un mandat de représentant du personnel, pendant un arrêt de travail pour maladie sont des activités non autorisées entraînant la suppression des IJSS.

Deux assurés sociaux, par ailleurs salariés d’entreprise et sportifs amateurs jouant en club, se voient notifier un indu par la CPAM correspondant à des indemnités journalières de sécurité sociale perçues.

Il leur est, en effet, reproché d’avoir participé à une compétition sportive pendant leur arrêt de travail pour maladie. Les salariés exercent un recours devant le tribunal des affaires de sécurité sociale à l’encontre de la notification de ces remboursements.

Le Tribunal des affaires de sécurité sociale de Reims accueille le recours des assurés au motif que :

  • la mention « sorties libres » sur l’arrêt de travail autorise implicitement la pratique d’un sport (jugement rendu le 15 mai 2009) ;
  • les arrêts de travail délivrés à l’assuré ne comportaient aucune mention relative à l’interdiction d’exercer une activité non autorisée et les éléments versés par la caisse n’établissaient pas qu’en toute connaissance de cause, celui-ci avait exercé une activité qui ne lui avait pas été préalablement autorisée par son médecin du travail (jugement rendu le 13 mars 2009).

Dans ces arrêts, était posée à la Cour de cassation la question principale de savoir si la participation à une compétition sportive par l’assuré pendant un arrêt de travail constitue une activité non autorisée donnant lieu au remboursement des IJSS.

Par plusieurs arrêts rendus le 9 décembre 2010, la chambre civile de la Cour de cassation casse les jugements rendus par le TASS sur le fondement des articles L.321-1 et L.323-6 du CSS.

Attendu de principe visé dans chaque arrêt : « l’attribution d’indemnités journalières à l’assuré se trouvant dans l’incapacité physique de continuer ou de reprendre le travail est subordonnée à l’obligation pour le bénéficiaire de s’abstenir de toute activité non autorisée ».

1ère espèce : « En statuant ainsi, alors qu’il résultait de ses constatations que l’intéressé avait participé pendant son arrêt de travail à une compétition sportive sans y avoir été autorisée et que la prescription de sorties libres n’équivalait pas à une telle autorisation, le tribunal a violé les textes susvisés ».

2ème espèce : « En statuant ainsi alors qu’il résultait de ses constatations que l’intéressé avait participé pendant son arrêt de travail à une compétition sportive de sorte que le manquement reproché à Mme X… était constitué et qu’il appartenait à l’assuré de prouver qu’elle avait été autorisée à pratiquer cette activité, le tribunal qui a inversé la charge de la preuve, a violé les textes susvisés ».

De ces constatations et énonciations, le tribunal a exactement déduit que l’assuré avait manqué à son obligation de s’abstenir de toute activité non autorisée.

Il appartient aux juridictions du contentieux général de la sécurité sociale saisies d’un recours formé contre la décision d’une caisse de retenir à titre de pénalité tout ou partie des indemnités journalières pour manquement du bénéficiaire à ses obligations, de contrôler l’adéquation du montant de la sanction prononcée par la caisse à l’importance de l’infraction commise par l’assuré ».

Aux termes de l’article L.323-6 du CSS, le service de l’indemnité journalière est subordonné à l’obligation pour le bénéficiaire :

1° d’observer les prescriptions du praticien ; 2° de se soumettre aux contrôles de la caisse prévus à l’article L.315-2 ; 3° de respecter les heures de sorties autorisées par le praticien ; 4° de s’abstenir de toute activité non autorisée.

Ces obligations s’imposent au salarié en maladie et au salarié percevant les IJSS à la suite d’une maladie professionnelle ou d’un accident du travail. En effet, l’article L.433-1 du CSS relatif à l’indemnisation de l’incapacité temporaire à la suite d’un AT/MP dispose que « le droit à l’indemnité journalière est ouvert dans les conditions définies à l’article L.323-6 ».

– Une activité professionnelle est une activité interdite

L’exercice d’une activité professionnelle est une activité que l’assuré doit s’interdire d’exercer, que cette activité soit indépendante, salariée, bénévole ou rémunératrice, ainsi du gérant d’une brasserie présent sur son lieu de travail pendant un arrêt maladie (Cass. Civ. 2ème, 25 juin 2009, n°08-17594, CPAM du Cher c/ Pellet).

– La participation à une compétition sportive est une activité interdite sauf autorisation expresse

Le principe : Il résulte des deux arrêts rendus par la chambre civile le 9 décembre 2010 que la participation à une compétition sportive constitue une activité non autorisée au sens de l’article L.323-6 du CSS.

La dérogation : toutefois, dans ces deux espèces, la Cour de cassation apporte une exception au principe de l’interdiction de participer à une compétition sportive.

En effet, elle précise que l’assuré peut être expressément autorisé à participer à une telle compétition. Dans le cas d’une telle autorisation, la participation à une compétition sportive n’est pas sanctionnable. Il nous semble qu’une telle autorisation, tant qu’elle est expresse, peut émaner du médecin traitant de l’assuré ou de la caisse à la demande de celui-ci.

Mais la prescription « sortie libre » n’équivaut pas à une telle autorisation. En outre, c’est à l’assuré de prouver qu’il a été expressément autorisé.

C’est la première fois, à notre connaissance, que la Cour de cassation se prononce sur l’autorisation ou non pour l’assuré de participer à une compétition sportive pendant un arrêt de travail.

Cependant, cette solution n’est guère surprenante dans la mesure où elle a déjà sanctionné un assuré ayant participé sans autorisation à des représentations publiques d’un spectacle musical dans le cadre d’une association bénévole (Cass civ 2ème, 9 avril 2009, n°07-18294, CPAM des Bouches du Rhône c/ Burkanian).

Est également interdite, l’activité exercée à domicile par un assuré souffrant à l’épaule de bricolage sans autorisation (Cass civ 2, 25 juin 2009, n°08-14670).

On verra ci-dessous que ces activités sont interdites au regard du droit de la sécurité sociale. A l’égard du code du travail, l’exercice d’une telle activité ne permet pas, en principe, à l’employeur d’user de son pouvoir disciplinaire.

– Sanctions prononcées par la Caisse

Lorsqu’il exerce une activité non autorisée, l’assuré est passible de deux sanctions.

D’une part, il devra restituer les indemnités journalières perçues à tort.

Dans cette hypothèse, la Cour de cassation rappelle dans l’un des arrêts du 9 décembre 2010 que le TASS est compétent pour contrôler l’adéquation du montant de la s
anction prononcée par la caisse à l’importance de l’infraction commise par l’assuré (Cass civ 2ème, 8 avril 2010, n°0-20906, CPAM de L’Essone c/ Brandon).

En outre, on peut noter que la Cour de cassation ne fait aucune référence dans les deux arrêts au caractère « volontaire » de l’inobservation des obligations imposées à l’assuré en application de l’article L.323-6. L’élément intentionnel se déduit de la participation par l’assuré à une activité non autorisée. Quoi qu’il en soit, le terme « volontaire » est supprimé par la LFSS pour 2011.

D’autre part, depuis la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011, l’assuré est également passible d’une pénalité en cas d’exercice d’une activité rémunérée pendant l’arrêt de travail.

– « Sanctions » prononcées par l’employeur

L’article L.315-2 impose à la caisse d’informer l’employeur de la suspension des IJSS. Dans ces conditions, l’employeur dûment informé, peut-il suspendre le paiement des indemnités complémentaires ou en réclamer le remboursement ?

La LFSS pour 2010 a organisé à l’article L.315-1 du CSS les conséquences de la contre visite organisée par l’employeur sur le versement des IJSS par la caisse qui dispose alors de la faculté de suspendre à son tour ce versement.

Cependant à l’inverse, aucune disposition ne permet automatiquement à l’employeur de suspendre le versement des indemnités complémentaires lorsque la caisse a pris l’initiative de suspendre le versement des IJSS ou d’en obtenir le remboursement à titre de sanction sur le fondement de l’article L.323-6 du CSS.

Par conséquent, la marge de manœuvre de l’employeur s’analyse au cas par cas et dépend de la source juridique des indemnités complémentaires.

Si le droit pour l’assuré au versement des indemnités complémentaires est expressément subordonné à sa prise en charge par la sécurité sociale, l’employeur sera sans doute autorisé à suspendre le versement des indemnités complémentaires en cas de suspension par la caisse des IJSS. A notre sens, il en sera ainsi dans le cas du maintien de salaire de l’article L.1226-1 du code du travail.

A l’inverse, si le versement de l’indemnité complémentaire n’est pas du tout subordonné à la prise en charge de l’assuré par la sécurité sociale, mais simplement à un arrêt de travail pour maladie, l’employeur restera tenu de verser le complément.

Ainsi, les termes de la convention collective seront nécessaires à l’employeur pour prendre la décision de suspendre le versement des indemnités complémentaires (Cass soc 12 mars 2002, n° 99-43975, SARL Indumeca c/ Coin ; Cass soc, 14 octobre 1998, n° 96-40682, Basset c/ Sté APAJH).

Autre question : l’employeur peut-il sanctionner disciplinairement le salarié ayant exercé une activité non autorisée ?

Non, l’employeur ne peut en aucun cas sanctionner un salarié qui n’a pas respecté ses obligations vis-à-vis de la sécurité sociale, sauf si ce dernier a commis un acte de déloyauté à son égard (Cass. soc. 27 juin 2000, n°98-40952, Bertin c/ Sté Semitib ; Cass soc, 23 novembre 2010, n°09-67249, Mme Aime c/ Sté Ambulances Caumes et Richard).

Ainsi, ni la participation à une compétition sportive, ni l’exercice d’un mandat de représentant du personnel, ne constitue une cause disciplinaire.

 

Me J-Christophe Beckensteiner Avocat associé Cabinet Fidal – Lyon

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