Déjà en 1996, on recensait pas moins de 73 types de contrôles légaux potentiellement applicables aux associations (1). Depuis lors, on assiste même à une multiplication des contrôles tous azimuts dont ISBL consultants s’est régulièrement fait l’écho (voir notamment, G. LEJEUNE, Association et transparence financière, Subventions publiques désormais accessibles aux citoyens, 26 juillet 2006). L’opacité financière des associations bénéficiant de subsides publics serait-elle un mythe ? Pour M. Pierre-Patrick KALTENBACH (2), « c’est au nom d’une supériorité morale par décret [que] ces Antigone subventionnées se prétendent représentatives de la société civile. Elles sont le bras séculier d’un secteur public déjà pléthorique ». L’auteur se prononce résolument en faveur d’une réforme radicale qui consisterait, à « séparer les associations des caisses publiques, des urnes, des corporations et du marché » ! Pour M. Pierre-Patrick KALTENBACH, il s’agit avant tout de « moraliser la dépense publique » en faisant en sorte que le secteur associatif dispose désormais d’« une gouvernance et une transparence crédible parce que certifiée par des organismes indépendants comme l’AFNOR ». Une position largement inspirée par le MEDEF qui, récemment encore, appelait à une certification : « La transparence financière, le MEDEF la demande pour toutes les organisations professionnelles et interprofessionnelles, pour toutes les organisations syndicales et pour toutes les ONG » (3).

Ainsi, on le voit, le débat portant sur la transparence financière des associations cache, en réalité, les enjeux idéologiques de demain : en premier lieu, la démocratie participative comme mode d’exercice du pouvoir dont l’association devrait être la figure de proue et, en second lieu, l’évaluation des politiques publiques qui touchent le secteur public et, par contre-coup, les associations bénéficiaires de fonds publics.

Ce débat connaît actuellement une certaine résonance politique, si l’on en croit les nombreuses initiatives prises dernièrement en matière de transparence financière des institutions sans but lucratif.

En effet, une mission parlementaire d’information sur la gouvernance des structures associatives présidée par le Député M. Pierre MORANGE devrait rendre ses conclusions en septembre 2008 : elles porteront notamment sur « le problème de transparence financière des associations en évaluant l’efficacité des contrôles existants ». Par ailleurs, Mme Roselyne BACHELOT-NARQUIN, Ministre de la Santé, de la Jeunesse et des Sports vient récemment de confier une mission à M. Jean-Louis LANGLAIS, Inspecteur général de l’administration honoraire, visant notamment à formuler pour le 31 mai 2008 « des propositions pour bâtir un partenariat renouvelé avec le monde associatif dont la place et le rôle sont appelés à s’accroître encore dans notre société ». Enfin, et dans le même ordre d’idée, comment ne pas citer ces deux propositions de lois déposées à quelques mois d’intervalle destinées à améliorer la transparence financière des syndicats.

Espérons que ces travaux sauront s’affranchir des idées reçues et ainsi utilement rappeler que « les contrôles et les outils du contrôle existent et, jusqu’à preuve du contraire, rien ne permet de dire que des associations dont la gestion, l’utilisation de fonds publics ou des dons publics, pouvant apparaître suspects pourraient y échapper (…) » (4). Par ailleurs, il n’est pas vain de souligner que le mouvement associatif doit nécessairement être associé aux réflexions en cours.

De ce point de vue, le recours à une « Charity commission » française intégrant très largement des représentants de la vie associative, de l’État et des experts qualifiés disposant des compétences requises pour évaluer le « bilan sociétal » des associations (5), à partir d’un référentiel partagé, doit à notre sens satisfaire les attentes formulées par l’ensemble des parties intéressées (associations, donateurs, financeurs publics). En tout état de cause, un tel processus de reconnaissance constituerait une réponse aux actions de labellisation commerciale qui tendent à se développer (certification AFAQ-AFNOR) et dont la mise en oeuvre suscite d’ores et déjà de nombreuses interrogations, voire même, quelques réserves majeures (coûts importants induisant, à terme, une dissociation entre « petites » et « grandes » associations, indépendance de l’organisme certificateur, pertinence des critères d’évaluation…).

Colas AMBLARD

Directeur des publications ISBL consultants

 

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Notes:

[1] G. Sousi, Maître de conférences Université Lyon III et co-directeur des Editions Lamy-associations, Le contrôle sur les associations : inventaires et questions, Les Petites Affiches, 24 avril 1996, n°50

[2] Pierre-Patrick Kaltenbach, « Non, les associations ne se valent pas ! » Le Figaro, 29 octobre 2007

[3] Déclaration MEDEF, 16 octobre 2007

[4] CPCA, Pour une véritable concertation sur la gouvernance et gestion responsable des associations, 22 juin 2007

[5] Selon le CJDS, le « bilan sociétal » permet l’évaluation de la responsabilité sociétale de l’entreprise, définie comme étant « l’attention portée à l’impact de ses actions sur l’ensemble des groupes économiques et sociaux parties prenantes ». Le bilan sociétal « ne définit pas de normes, ne porte pas de jugement de valeur, mais établit un portrait de l’entreprise », à partir d’un double questionnaire, très détaillé à l’entreprise et plus léger aux salariés. Le bilan sociétal, testé dans une centaine d’entreprises, permet le croisement de l’ensemble des critères et domaines retenus. Il peut servir à l’élaboration d’un tableau de bord de l’entreprise et s’intégrer dans son système de gestion.

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