Parmi les préoccupations des Français, le secteur sanitaire, social et médico-social constitue, par sa richesse et la diversité de ses actions, un puissant facteur de lien social au service de la collectivité. Analysant les pénuries installées ou annoncées en terme de personnels qualifiés, mais également les besoins croissants notamment liés au vieillissement de la population, notre assemblée estime nécessaire, pour garantir la pérennité et l’adaptation du système sanitaire et social à l’évolution de ses missions, d’anticiper les besoins et de mieux gérer sur la durée le recrutement, la formation et la professionnalisation des personnels salariés du secteur.

Notre système sanitaire, médico-social et social est un élément majeur oeuvrant pour la cohésion sociale du pays, donnant tout son sens à l’expression de la solidarité collective d’une Nation. Par l’usage de moyens d’interventions adaptés et coordonnés entre eux, le secteur sanitaire et social et, à travers lui, ses personnels visent à renforcer l’effectivité des droits universels de protection et de bien-être. Il garantit à tous l’égalité d’accès à ses différentes formes d’intervention sur l’ensemble du territoire national.

Aujourd’hui et plus encore dans les décennies à venir, les professionnels du secteur social et de la santé vont être conduits à jouer un rôle déterminant, économiquement et socialement, afin d’assurer la continuité des soins et des interventions sociales, au regard de l’allongement de la vie et de l’augmentation de la demande de soins qui en résultent, ou encore des nouvelles problématiques ou formes d’exclusion. La mise en oeuvre de ces missions va en outre s’inscrire dans un contexte de pénuries en personnels déjà installées ou à venir, ainsi que d’insuffisante qualification d’une partie des personnels.

Pour le Conseil, l’avenir du secteur sanitaire et social est intimement lié à celui de ses personnels. Afin de répondre dans les meilleures conditions possibles aux enjeux sanitaires et sociaux, les solutions à mettre en oeuvre passent, dès lors, par une dynamisation du recrutement, une réflexion sur le contenu comme sur les modalités des formations initiales et continues et, enfin, par une action continue de professionnalisation de l’ensemble des salariés du secteur.

Les nouveaux défis de l’action sanitaire et sociale

Au même titre que le système de protection sociale auquel il participe pleinement, le système sanitaire, médico-social et social, élément majeur de la cohésion sociale de notre pays et source essentielle de solidarité entre les Français, répond au droit universel de protection et de bien-être des citoyens. Le principe de solidarité figure au coeur même du système, placé au rang de valeur républicaine. Il s’agit bien de garantir l’égalité de tous pour l’accès aux droits (soins, santé, prévention, action sociale), en fonction des besoins et sur l’ensemble du territoire, et de permettre l’accès de tous à des établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux accueillants et de qualité.

  • Un secteur riche et complexe, face à de forts enjeux pour l’avenir

Le secteur sanitaire et social apparaît comme un secteur important de l’économie française. Qu’il s’agisse des politiques conduites en matière de santé et d’action sociale, du nombre d’établissements, de celui de ses personnels ou encore de celui des usagers, il constitue en effet une force économique et sociale majeure.

Tel qu’il ressort de la loi hospitalière du 31 juillet 1991 mais également de celle relative à l’action sociale et médico-sociale du 2 janvier 2002, il regroupe près de 31 000 établissements et services répartis entre public et privé, à caractère commercial ou sans but lucratif, et s’adressant aux personnes malades, aux personnes âgées, aux enfants et adultes en situation de handicap, aux enfants, adultes et familles en difficulté sociale, mais aussi au travers de l’aide au maintien à domicile ou de la garde d’enfants.

Il se caractérise également par un nombre important de personnels – environ 1 600 000 personnes en équivalent temps plein – dont près des trois quarts sont représentés par les infirmiers, les aides soignants, les agents de services hospitaliers et les médecins pour les professions de santé, et par les assistants maternels et les auxiliaires de vie sociale s’agissant des professions sociales.

Le secteur sanitaire et social est aujourd’hui confronté à de multiples enjeux afin de garantir la continuité des soins et des interventions sociales de qualité dans notre pays. Il s’agit en effet de mieux prendre en compte les aspirations des individus, dans un contexte de vieillissement de la population, et notamment de permettre, chaque fois que c’est réalisable, aux personnes de rester chez elles le plus longtemps possible. Il importe par ailleurs de répondre aux besoins de cohésion sociale dans un environnement marqué par une massification du chômage et des phénomènes de pauvreté et d’exclusion qui en sont souvent le corollaire. Il convient enfin de faire face aux situations de sous-effectifs de certaines professions et sur certains territoires et de répondre à la pénurie annoncée de professionnels.

  • La situation des professionnels

Sur le plan des professions médicales, l’existence d’inégalités en termes de répartition des spécialités médicales sur le territoire hexagonal, de répartition géographique entre le nord et le sud, entre milieux rural et urbain, centres-villes et périphéries, voire entre exercice libéral ou activité salariée, couplée aux difficultés de recrutement qui existent déjà pour certaines spécialités médicales, principalement l’anesthésie, la chirurgie, l’obstétrique,l’ophtalmologie, la pédiatrie, l’ORL et la psychiatrie, risquent encore de s’accentuer au point de devenir d’une extrême gravité dans les années 2010-2015, si la tendance observée aujourd’hui subsiste et s’amplifie.

Les professions d’infirmiers et d’aides soignants vont de leur côté devoir faire face, d’ici dix à quinze ans, au départ massif des professionnels les plus expérimentés, ce qui va conduire à terme à une situation problématique. A titre d’exemple, d’ici à 2015, la fonction publique hospitalière perdra plus de la moitié des agents de ces deux filières, du fait des départs à la retraite.

La démographie professionnelle s’avère tout aussi défavorable pour le secteur social et médico-social qui va subir de la même façon un fort renouvellement du personnel dans la quasi-totalité des emplois – environ un quart des effectifs de la branche atteindront les 60 ans dans les dix années qui viennent – , la situation étant particulièrement critique pour les éducateurs spécialisés et les assistants sociaux, ainsi que pour les personnels d’encadrement.

Le secteur sanitaire et social, placé tout à la fois devant d’importantes difficultés de recrutement, des carrières relativement courtes pour certaines d’entre elles et de fortes rotations d’effectifs concernant des emplois sensibles, se trouve également confronté avec acuité à la pénibilité des conditions de travail, à la faiblesse des conditions d’emploi, de rémunérations et de perspectives de carrière, et plus généralement à la question de l’attractivité de ces métiers.

Certaines branches d’activité, telles l’aide au maintien à domicile ou les établissements et services pour personnes âgées, souffrent plus particulièrement d’un fort déficit d’image. Dans une société valorisant la performance, la beauté et la jeunesse, il apparaît louable mais peu gratifiant de s’occuper de personnes en situation de dépendance ou d’infirmité.

L’importance de la professionnalisation et de la formation

Alors même que le constat est globalement fait d’une pénurie de professionnels, critique aujourd’hui formulée pour certains métiers mais qui pourrait à l’avenir encore s’amplifier, l’évolution des attentes et des besoins de la société tant sur le plan sanitaire qu’en termes d’action sociale exige le recrutement et la formation de personnels qualifiés.

Aujourd’hui, l’ensemble du secteur est marqué par une proportion importante de personnels de bas niveau de quali
fication et de faisant-fonction, ainsi que par un recours croissant à des contrats aidés, notamment dans le domaine social à des emplois jeunes. Il se trouve de fait confronté à une exigence accrue de professionnalisation et de qualification de ces salariés, vecteurs majeurs et indispensables à la légitimité d’acquisitions spécifiques et reconnues et permettant d’apporter la réponse adaptée à la demande d’aide, de soins ou d’écoute des usagers.

Se pose comme élément supplémentaire de la réflexion la question du contenu des tâches pour les médecins, infirmiers et aides soignants.

Par ailleurs, ces dernières années ont connu le développement d’un débat sur le glissement du modèle de la qualification – basée sur la formation et le diplôme – vers un modèle de la compétence – privilégiant la reconnaissance des aptitudes et les expériences individuelles ainsi que la capacité personnelle à se mobiliser au service des objectifs de l’organisation.

Dans un contexte marqué par l’évolution des besoins des usagers, la diversification des parcours des personnels du secteur, ou encore les évolutions démographiques du secteur, l’un des enjeux particulièrement forts semble dès lors résider dans une clarification et une meilleure articulation entre la formation initiale et la formation continue et dans la combinaison des différentes modalités d’acquisition des connaissances et des savoirs professionnels, allant de l’usage du stage au tutorat, en passant par l’apprentissage ainsi que par les autres formes d’alternance.

La problématique de la formation des personnels du secteur sanitaire et social se situe nécessairement, du point de vue de son actualité, non seulement dans les effets attendus des lois de décentralisation, mais au moins autant dans les perspectives ouvertes par la loi du 4 mai 2004 sur la formation professionnelle tout au long de la vie.

Le secteur s’inscrit déjà résolument dans les attendus et les dispositions de la nouvelle loi. En témoignent les débats qui animent le champ depuis de nombreuses années, les pratiques qui s’y développent et les expérimentations qui y sont conduites dans le cadre d’une gestion paritaire et concertée.

C’est ainsi que, de manière plus appuyée encore dans ce secteur que dans d’autres, on constate que les formations ont progressivement été repensées sous l’angle de l’acquisition de connaissances et de compétences et non plus seulement de qualifications acquises indépendamment des pratiques auxquelles elles renvoient. Dans ce cadre, le développement de la validation des acquis de l’expérience et d’un tutorat adapté, apparaissent comme autant d’outils mobilisables par les acteurs pour répondre aux besoins de la société.

Au regard de l’importance des enjeux d’avenir, il apparaît donc essentiel d’oeuvrer à ce que le secteur sanitaire et social retrouve son attractivité et à ce que les personnels soient préparés au mieux à la prise en charge des populations bénéficiaires, d’où la nécessité de s’attacher à recruter des personnels qualifiés, mais également de revisiter les formations initiales et continues et d’oeuvrer à la professionnalisation de l’ensemble des personnels salariés.

 

PINAUD Michel

 

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