Contrairement à la réglementation applicable en matière de droit des sociétés, la loi du 1erjuillet 1901 et son décret d’application ne prévoient rien en matière d’information des membres de l’association. En effet, et en dehors de toute obligation statutaire spécifique, ces derniers se trouvent dès lors dans l’impossibilité de se procurer les documents de gestion interne de la structure au sein de laquelle ils ont adhéré, voire même cotisé. Une situation troublante pour bon nombre d’organismes associatifs dont l’appartenance à la composante d’économie sociale et le régime fiscal (Instr. fisc. BOI 4 H-5-06, 18 déc. 2006) sont pour une bonne partie fondés sur le respect des règles de démocratie interne et de transparence financière.

En matière de droit d’information des membres, force est de constater que la jurisprudence se montre réticente à appliquer aux associations les règles de droit des sociétés (1). Ceux-ci doivent-ils par conséquent se contenter de la présentation annuelle du rapport de gestion faite par les instances dirigeantes de l’association et des documents rendus publics, c’est-à-dire ceux déposés en Préfecture : statuts et composition du Conseil d’administration et du bureau ?

Oui, si l’on en croit la jurisprudence actuelle.

Certes, la Cour d’appel de Paris (2) a déjà eu l’occasion de consacrer le droit pour les membres de solliciter des informations sur la gestion associative, sous réserve de ne pas abuser de leur droit de critique. Néanmoins, l’approche de la juridiction du second degré consistait avant tout à circonscrire la régularité d’une procédure disciplinaire intentée à l’encontre d’un membre indélicat. En outre, le défaut d’information préalable des membres d’une association, à l’occasion d’une modification statutaire figurant à l’ordre du jour sans aucune précision (3), constitue une cause de nullité substantielle de l’assemblée générale. Enfin, certains dispositifs législatifs particuliers peuvent imposer de transmettre aux membres de l’assemblée générale les comptes annuels (4) ou leur permettre d’accéder à ces informations financières (5).

En dehors de ces cas spécifiques, il apparaît ainsi que le droit d’information des membres n’est pas suffisamment assuré au sein de la plupart des associations simplement déclarées :

En effet, dans le silence des statuts, il a été jugé que les membres ne pouvaient obtenir communication.

  • des procès verbaux de réunion du Conseil d’administration et des assemblées générales (6).
  • des documents comptables préalablement à l’assemblée générale (7).

C’est dans cet ordre d’idée que le Tribunal de grande instance de Lyon dans une décision en date du 15 décembre 2008 (8) vient de débouter un ancien trésorier de ses demandes de communication de relevés bancaires aux motifs que ce dernier « ne caractérise aucune obligation légale ou réglementaire pour le Président de l’association de remettre les relevés de comptes bancaires aux adhérents, la reddition des comptes de gestion se faisant selon les formes statutairement prévues par le rapport financier présenté à l’assemblée générale et la mesure qu’il sollicite se heurte dès lors à une contestation sérieuse dans son principe, d’autant qu’il n’allègue par ailleurs aucune opération litigieuse ou contraire aux intérêts de l’association pouvant traduire l’existence d’un réel différend rendant nécessaire une vérification des comptes ».

Interrogé sur la possibilité pour un membre d’avoir accès aux comptes de l’association après en avoir fait la demande auprès du Président ou du Trésorier, le Ministre de l’intérieur n’a pu quant à lui que constater l’existence du vide juridique en la matière (9).

Certes, les membres disposent toujours de la faculté de solliciter en justice la désignation d’un expert sur le fondement de l’article 145 du NCPC afin que ce dernier établisse un rapport sur telles ou telles opérations qui leur paraissent litigieuses.

Cependant, cette seule solution existante au bénéfice des membres fait un peu désordre dans un contexte où nos concitoyens appellent de leurs bons voeux à plus de transparence financière. Dans un sondage CSA réalisé en octobre 2008 (10), il ressort que 76% des Français font massivement confiance aux associations.

Il n’y a plus qu’à espérer qu’ils ne soient pas déçus…

Colas AMBLARD

Docteur en droit – Avocat NPS consulting Société d’avocats Directeur des publications ISBL consultants

 

Cet Edito ISBL consultants fait l’objet d’une publication aux éditions LAMY ASSOCIATIONS – Bulletin actualités février 2009 n°168

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Notes:

[1] CA Paris, 30 octobre 2001, rev. soc. 2002.87, obs. Guyon

[2] CA Paris, 1ère ch. B 5-1é-97 n°97/05218 Larquetoux c./ Association Réseau du sport de l’air

[3] Tribunal de grande instance de Fort-de-france, 16 avril 1991, n° 598

[4] Voir notamment pour les associations RUP (Loi du 1er juillet 1901, art. 8) ou pour les fédérations sportives (Loi du 16 juillet 1984 modifiée)

[5] Loi n°2000-321 du 12 avril 2000, art. 10, al. 6 et Décret n°2001-495 du 6 juin 2001, art. 2 pris en application de l’article 10 de la loi du 12 avril 2000 : « les organismes de droit privé ayant reçu annuellement de l’ensemble des autorités administratives une subvention supérieure à 153 000 euros doivent déposer à la préfecture du département où se trouve leur siège social leur budget, leurs comptes […] et, le cas échéant, les comptes rendus financiers des subventions reçues pour y être consultés »

[6] CA Paris 1ère ch. A 30 octobre 2001, n°00/23476 : RJDA 3/02 n°271

[7] CA Rouen, ch. appels prioritaires 13 janvier 2004, n°02/02395 : BAF 5/04 inf. 52

[8] TGI Lyon, 15 décembre 2008, dossier n°08/02780 (inédit)

[9] Réponse de M. le ministre de l’intérieur à M. Denis Jacquat, JO ass. Nat. du 9 septembre 2002, p.3070, n°340

[10] Sondage CSA réalisé pour le Crédit Coopératif, Deloitte et In Extenso, auprès d’un échantillon représentatif de 1002 français âgés de 18 ans et plus

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