Comme toute entreprise(1), les associations doivent optimiser leur statut fiscal. En effet, l’équilibre économique de ces structures dépend de leur capacité à augmenter leurs ressources autant qu’à maîtriser leurs charges, notamment d’impôts. C’est pourquoi une bonne connaissance des exonérations et franchises applicables au secteur associatif peut être très profitable.

Augmenter constamment ses ressources n’est pas toujours possible pour une association : les subventions publiques se raréfient(2), la générosité des particuliers(3) et entreprises(4) connaît des limites, les recettes d’exploitation doivent être maîtrisées pour éviter que l’association bascule vers le « tout-lucratif » et augmenter la participation des usagers risque de faire dévier l’organisme de sa démarche originelle. Ces organismes doivent par conséquent faire preuve d’ingéniosité pour concilier logiques sociale et économique. Surtout, il importe d’éviter de puiser dans les fonds propres lorsqu’ils existent. Malgré toutes ces contraintes et quel que soit son domaine d’activité, gérer son statut fiscal n’est pas synonyme d’immobilisme pour une association, bien au contraire.

Développer des ressources privées lucratives et non lucratives 

C’est une des préconisations formulées par le Haut Conseil à la vie associative (HCVA) dans son rapport du 13 mars 2014(5), qui encourage le secteur associatif à « inventer une troisième voie ». Après avoir précisé que la part des ressources privées est en constante augmentation dans le budget des associations(6), le HCVA rappelle que les recettes d’activités représentent plus de 50 % de leur budget dans 10 pays (Brésil, Espagne, États-Unis, Inde, Italie, Japon, Norvège, Royaume-Uni, Suède et Suisse) contre seulement 36 % en France.

Il convient de rappeler que les recettes d’exploitation tirées d’activités non lucratives réalisées par les associations, quelque soit leur montant, ne sont pas assujetties aux impôts commerciaux(7) soit parce que l’activité ne concurrence pas un organisme lucratif, soit – si la situation concurrentielle est effectivement caractérisée – parce que l’activité associative se distingue de celle pratiquée par les organismes lucratifs au regard de la règle des « 4P », à savoir du produit et du public visé (critères d’utilité sociale), des prix pratiqués par l’association – qui doivent être nettement inférieurs à ceux du marché – et de l’absence de publicité(8).

S’agissant des recettes d’activités lucratives, celles-ci devront demeurer accessoires par rapport au but que s’assigne l’association et, en tout état de cause, ne pas dépasser le seuil de 60.000 euros hors taxes par année civile(9). Les associations qui bénéficient de cette franchise ne sont imposées ni à l’IS de droit commun, ni à la TVA, ni à la cotisation foncière des entreprises (CFE). Cette tolérance peut profiter à l’ensemble des associations(10), et notamment aux associations sportives, aux comités des fêtes(11) ou encore aux offices de tourisme(12) pour les recettes liées à la traditionnelle buvette, à la vente de services payants ou de produits dérivés, ou encore au sponsoring (ou parrainage).

Organiser des manifestations exceptionnelles 

Toutes les associations ainsi que les organismes assimilés(13) peuvent bénéficier d’une exonération générale(14) (IS et TVA) portant sur la totalité des recettes générées par l’organisation de six manifestations exceptionnelles par an à leur profit exclusif(15). L’exonération concerne les manifestations de bienfaisance et de soutien permettant à la structure organisatrice de se procurer des moyens financiers exceptionnels afin de financer les buts qu’elle poursuit(16). L’exonération peut être invoquée pour un événement – tel que kermesses, loteries, tombolas, bals, concerts, séances de cinéma ou de théâtre, ventes de charité, expositions, divertissements sportifs non soumis à l’impôt sur les spectacles – qui ne constitue pas l’objet même de l’association.

L’événement doit durer un court laps de temps, par exemple un week-end maximum. L’ensemble des recettes(17) perçues au titre de la manifestation exceptionnelle donne lieu à exonération, laquelle s’applique également sur la taxe sur les salaires des personnes recrutées à cette occasion et pour la durée de cette manifestation(18). À noter enfin que cette exonération est cumulable avec la franchise commerciale précédemment décrite.

Facturer des services à ses adhérents 

En matière de TVA, il existe plusieurs exonérations spécifiques au secteur associatif.

  •  « Les services de caractère social, éducatif, culturel ou sportif rendus à leurs membres par les organismes légalement constitués agissant sans but lucratif et dont la gestion est désintéressée. »(19) Cette exonération a pour objet de rendre plus accessible le type de prestations suivants : crèches, colonies de vacances et centres aérés, maisons de retraite et de repos, villages de vacances ; concerts, séances de théâtre et de cinéma, expositions, ou encore exploitation de bibliothèques, musées, jardins botaniques et ventes de livres, disques, films et autres matériels éducatifs ou culturels, formation professionnelle(20) ; mise à disposition de stades, terrains ou salles de sport, centres de plein air, courts de tennis, etc.

Seules les prestations réalisées au profit de véritables membres – c’est-à-dire en direction de personnes dont l’adhésion présente un caractère de permanence et leur confère le droit de participer aux assemblées générales et d’être élues aux instances de gouvernance de l’association – sont éligibles à l’exonération. À ce propos, la question concernant la possibilité pour les ayants droit des membres de bénéficier de ce type de prestations exonérées est longtemps restée en suspens. Pour l’administration, ces derniers – les conjoints, par exemple – demeuraient des tiers vis-à-vis de l’association s’ils n’avaient pas fait personnellement acte d’adhésion(21). Le Conseil d’État semblait quant à lui beaucoup moins restrictif(22). C’est en ce sens que la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE)(23) a récemment tranché en admettant que l’exonération de TVA puisse également bénéficier à des joueurs de golf, non affiliés au club de golf associatif(24).

Autre précision : l’exonération de TVA porte également sur les ventes accessoires à concurrence de 10 % des recettes totales réalisées – représentées par l’intégralité des ressources financières, intégrant les produits des ventes et les subventions –, sauf celles découlant de l’exploitation de bars et buvettes ainsi que des opérations de restauration et d’hébergement. Les associations peuvent donc élargir le cercle des bénéficiaires de leurs prestations de services et ainsi accroître leurs ressources.

  •  « Les opérations faites au bénéfice de toutes personnes par des œuvres sans but lucratif qui représentent un caractère social ou philanthropique et dont la gestion est désintéressée, lorsque les prix pratiqués ont été homologués par l’autorité publique ou que des opérations analogues ne sont pas couramment réalisées à des prix comparables par des entreprises commerciales en raison notamment du concours désintéressé des membres de ces organismes ou des contributions publiques ou privées dont ils bénéficient. »(25). Cette exonération de TVA et d’IS(26) organisée pour ce type d’opérations a vocation à bénéficier aux organismes sans but lucratif afin que ceux-ci puissent facturer des services tout en leur évitant de demander systématiquement aux usagers d’adhérer. Elle concerne, par exemple, les ateliers et entreprises protégés(27), les offices de tourisme et syndicats d’initiative pour leurs activités d’organisation de manifestations ou d’exploitation d’installations sportives et culturelles(28), les établissements et services d’aide par le travail (ESAT)(29) ainsi que les organismes exploitant des musées ou monuments historiques bénéficiant de subventions(30), ou encore les associations de permanence de soins et d’urgences médicales et les centres de soins vétérinaires exploités par des associations reconnues d’utilité publique(31). Cette exonération doit être exploitée par l’association qui, en outre, peut conserver la maîtrise de la gouvernance de son projet.
  •  « Les services à la personne. »(32) Cette exonération de TVA bénéficie aux associations (mandataires ou prestataires) disposant d’un agrément(33) – ou ayant effectué une déclaration de services(34) – et qui délivrent des services à des publics considérés comme fragiles, notamment aux enfants de moins de trois ans, personnes âgées dépendantes ou handicapées. En leur évitant un surcoût de TVA, cette disposition exonératoire facilite l’accès aux services rendus par les associations en direction d’une population bien spécifique.

 

Mutualiser des services entre associations 

Dans le cadre des opérations de mutualisation de moyens matériels et humains, il existe également un certain nombre d’exonérations en matière de TVA.

  • « Les services rendus à leurs adhérents par les groupements constitués par des personnes physiques et morales exerçant une activité exonérée de TVA ou pour laquelle elles n’ont pas la qualité d’assujetti, à la condition qu’ils concourent directement et exclusivement à la réalisation de ces opérations exonérées ou exclues du champ d’application de la TVA et que les sommes réclamées aux adhérents correspondent exactement à la part leur incombant dans les dépenses communes. »(35) Cette exonération bénéficie aux associations qui rendent des services professionnels – tels que mise à disposition de personnels ou de matériels, de recrutement, de gestion et de paie, de recrutement, d’informatique et de tenue de comptabilité(36), de gestion et d’entretien des locaux – à leurs membres, qui peuvent être d’autres associations ou organismes sans but lucratif (non assujettis), des organismes professionnels, des syndicats ou des groupements d’employeurs, ainsi qu’aux fédérations ou unions qui exercent des services communs au profit d’associations membres.

Le Conseil d’État(37) admet que ces services soient également rendus à des tiers sans perte du bénéfice de l’exonération pour ceux rendus aux adhérents, sans autre précision. Toutefois, l’administration fiscale(38) adopte une position plus restrictive en considérant que les recettes provenant de non-adhérents ne doivent pas atteindre ou dépasser la moitié de celles perçues au total par l’organisme en charge de la mutualisation de moyens.

  • « Les services exercés par les associations intermédiaires, et en particulier toutes les opérations de mise à disposition de personnel »(39), sont exonérés de plein droit de la TVA, sans option possible.

Se regrouper avec d’autres associations 

Dans le cadre des opérations de fusion, de scission et d’apport partiel d’actif, trois instructions fiscales du 13 juin 2014(40) sont venues préciser le régime fiscal de ces opérations réalisables entre associations(41). Désormais, lorsqu’elles seront réalisées entre deux associations soumises à l’IS, celles-ci pourront bénéficier du régime fiscal de faveur, ce qui se traduira par une exonération d’IS portant sur les plus-values enregistrées à cette occasion. Très attendues, ces instructions fiscales permettent désormais d’aligner le régime fiscal de ce type d’opérations sur celui des sociétés commerciales, alors même que la cour administrative de Douai avait laissé planer un doute sur ces perspectives d’harmonisation dans une décision en date du 21 octobre 2010(42).

Embaucher du personnel salarié 

En 2004, le gouvernement de l’époque n’avait pas donné suite à la demande d’exonération totale de la taxe sur les salaires au profit des associations, formulée par la Fédération française des maisons des jeunes et de la culture(43). Récemment, un effort important a été consenti dans le but de soutenir l’emploi associatif, en particulier en direction des « petites » associations (moins de 30 salariés), pour lesquelles le gouvernement a fait passer l’abattement annuel portant sur la taxe sur les salaires normalement due(44) de 6.002 euros à 20.161 euros à raison des rémunérations versées depuis le 1er janvier 2014(45). Dans le même temps, cette taxe sur les salaires n’est pas due lorsque son montant annuel est inférieur à 1.200 euros(46). Cette franchise permet aux redevables d’être dispensés des versements et relevés mensuels ou trimestriels lorsqu’ils estiment que le montant annuel de cette taxe ne dépassera pas ce seuil(47).

Ces différents exemples de franchises et d’exonérations – dont la liste est loin d’être exhaustive – montrent aux associations et autres organismes sans but lucratif tout l’intérêt qu’ils peuvent avoir à se soucier de leur statut fiscal dans l’optique de pérenniser leurs actions. En améliorant leur gestion et en assainissant leur situation financière, cette démarche participe du mouvement de professionnalisation qui traverse actuellement le secteur associatif au moment où une partie de celui-ci s’apprête à entrer de plain-pied dans la sphère économique suite à la promulgation de la loi sur l’économie sociale et solidaire en juillet dernier(48).

Colas AMBLARD, Directeur des publications

En savoir plus :

Cet article a fait l’objet d’une publication aux éditions Juris-associations (Dalloz) dans le n°505 du 1 octobre 2014 :Télécharger l’article 

Colas AMBLARD, « Restructuration des associations : le régime fiscal est enfin précisé !« , ISBL CONSULTANTS 12 septembre 2014

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Documents joints:

Juris-associations (Dalloz) dans le n°505 du 1 octobre 2014



Notes:

1. V. JA no 371/2008, p. 12.
2. V. Tchernonog, Le Paysage associatif français – Mesures et évolutions, 2e éd., Éditions Juris / Dalloz, 2013.
3. Recherches & Solidarités, « La générosité des Français », 18e éd., nov. 2013.
4. « Le mécénat d’entreprise en France – Résultats de l’enquête Admical / CSA, 2014 ».
5. HCVA, « Le financement privé du sec- teur associatif », 13 mars 2014, p. 6.
6. V. Tchernonog, préc., tableau 182 : en 2011, les financements privés sont désormais majoritaires (51 % contre 49 % en 2005), avec 36 % de recettes d’activités (contre 32 % en 2005).
7. Impôt sur les sociétés (IS), taxe sur la valeur ajoutée (TVA), contribution économique territoriale (CET).
8. BOFiP-impôts, BOI-IS-CHAMP-10-50-10-20, 12 sept. 2012, § 570 et s.
9. CGI, art. 206, 1 bis, art. 261, 7, 1° et art. 1447, II.
10. À l’exception toutefois des associations qui entretiennent des relations privilégiées avec les entreprises (BOFiP-Impôts, BOI-IS- CHAMP-10-50-20-20, 18 mars 2013, § 50), des associations fermées qui bénéficient de l’exonération de TVA prévue à l’article 261, 7, 1o a du CGI et des associations de commerce équitable (rép. min. à Y. Nicolin, JOAN CR du 15 janv. 2001, no 48244, non reprise dans le BOFiP-Impôts).
11. Rép. min. à J. Parrenin, JOAN CR  du 11 déc. 2000, no 45373.
12. Rép. min. à L. Souvet, JO Sénat CR  du 18 janv. 2001, no 25109, non reprise dans le BOFiP-Impôts.

13. Fondations, fonds de dotation, congré- gations religieuses, comités d’entreprise, comités des fêtes municipaux et offices municipaux de tourisme (BOFiP-Impôts, BOI-TVA-CHAMP-30-10-30-10, 21 nov. 2013, § 470), partis politiques (rép. min. à J.-L. Masson, JOAN CR du 22 juill. 1996, no 36636, non reprise dans le BOFiP-Impôts), etc.
14. CGI, art. 261, 7, 1o c.
15. BOFiP-Impôts, BOI-TVA- CHAMP-30-10-30-10, préc., § 580.
16. Ibid., § 490 à 510.
17. Prix d’entrée à la manifestation et diverses opérations effectuées par l’organisateur : bar, buffet, buvette, vestiaire, location de stands, publicité, vente de programmes, de produits dérivés, d’enregistrements sonores, etc.
18. CGI, art. 231 bis L.
19. CGI, art. 261, 7, 1o a.
20. BOFiP-Impôts, BOI-TVA-CHAMP-30-10-30-20, 12 sept. 2012, § 170.
21. BOFiP-Impôts, BOI-TVA-CHAMP-30-10-30-10, préc., § 70.
22. CE 27 juill. 1984, no 26942, RJF 11/84, no 1312.
23. CJuE 19 déc. 2013, aff. C-495/12 ; v. JA no 492/2014, p. 11.
24. BOFiP-Impôts, BOI-TVA-CHAMP-30-10-30-20, préc., § 1 à 70.
25. CGI, art. 261, 7, 1° b.
26. BOFiP-Impôts, BOI-IS-CHAMP-30-70, 12 sept. 2012, § 30.
27. BOFiP-Impôts, BOI-IS-CHAMP-10-50-10-20,  préc., § 720 à 760. Il est possible d’opter pour le paiement de la TVA.
28. BOFiP-Impôts, BOI-TVA-

 

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