Comme il en est de principe pour de nombreuses règles de fonctionnement des associations, la liberté est également de mise pour les sociétaires en ce qui concerne la fixation de la durée des fonctions du dirigeant. Il leur est ainsi loisible de convenir d’un mandat à durée déterminée ou indéterminée, les dirigeants étant, dans ce dernier cas, nommés pour la durée de l’association. Classiquement, le dirigeant quittera ses fonctions au terme de la durée de son mandat. Toutefois, en dehors de ce schéma parfois théorique, certains évènements, lesquels feront souvent l’objet de modalités spécifiques dans les statuts de l’association, provoqueront un changement anticipé de la tête gouvernante. Il s’agira ainsi d’évènements indépendants de la volonté des acteurs en présence, tel le décès du dirigeant, ou sa dissolution pour le cas d’une personne morale dirigeante. Mais également, la rupture anticipée du mandat de représentation résultera très souvent d’une manifestation unilatérale de volonté : celle du dirigeant, pour le cas de la démission ; celle des sociétaires pour le cas de la révocation. Deux mécanismes qu’il convient d’étudier en détails.

1/ La démission du dirigeant d’association

1.1/ Un acte positif

Comme tout mandataire, le dirigeant d’association peut, à tout moment, mettre fin au mandat qui lui a été donné. Cette règle découle simplement de l’article 2003 du Code civil exposant les règles régissant la fin du contrat de mandat. Si la loi n’apporte aucune précision quant aux formes de cette démission, la jurisprudence indique que cette rupture doit résulter d’un acte positif manifestant une volonté claire et dépourvue d’équivoque de la part de son auteur. C’est la raison pour laquelle la rédaction d’un écrit doit toujours être privilégiée, qu’il s’agisse d’une lettre de démission classique par lettre recommandée avec accusé de réception adressée à l’association ou, par exemple, d’une démission orale prononcée lors d’une assemblée générale, mais qui sera consignée sur un procès-verbal. C’est également sur ce motif qu’il est toujours refusé, a contrario, de déduire d’un simple comportement du dirigeant une quelconque volonté de démissionner. Ainsi, la cessation de fait de ses fonctions (Cass. com., 13 mars 1979) ou encore le non versement d’une cotisation (CA Lyon, 19 novembre 1982) ne pourront jamais s’analyser en une démission.

1.2/ Un acte unilatéral

En tout état de cause, la démission du dirigeant n’a pas à être acceptée par l’association et peut, en conséquence, produire tous ses effets dès qu’elle a été portée à la connaissance de cette dernière. A l’égard des tiers, en revanche, la démission prend effet à compter de l’accomplissement des formalités modificatives en préfecture. Dans la même logique, la démission n’a pas à être motivée ni à être justifiée par le dirigeant.

1.3/ Un acte simple aux conséquences parfois complexes

Les règles exposées ci-dessus laissent transparaître un mécanisme relativement peu contraignant. Cependant, il n’en demeure pas moins que la démission du dirigeant peut soulever des contestations et susciter certaines interrogations. Ainsi notamment, le dirigeant peut-il se rétracter de sa démission ? La réponse est positive, à condition que ce dernier parvienne à démontrer que sa décision ne résultait pas d’une volonté libre et éclairée (Cass.com., 22 février 2005).

Également, un dirigeant d’association peut-il engager sa responsabilité suite à sa démission ? Oui, si l’association parvient à prouver que le caractère inopiné ou intempestif de la rupture du mandat lui a causé un préjudice sauf, évidemment, à ce que le dirigeant prouve qu’il ne pouvait poursuivre ses fonctions sans risquer lui-même un préjudice considérable (article 2007, al. 2 du Code civil).

PRATIQUE : Afin d’éviter tout risque de démission brutale, il est conseillé de stipuler dans les statuts de l’association une durée de préavis à respecter tout en veillant à ce qu’elle ne soit pas excessive et donc de nature à supprimer tout droit à démission (souvent fixée à deux ou trois mois). En cas de violation du préavis, l’auteur de la démission pourra engager sa responsabilité et risquer une condamnation au paiement de dommages-intérêts à l’association sauf à ce qu’il parvienne à justifier légitimement des raisons de cette rupture brutale de mandat.

1.4/ Cas particulier de la démission forcée

Parallèlement à la démission résultant d’un acte de volonté unilatéral du mandataire, certains événements sont de nature à provoquer une démission d’office du dirigeant, encore appelée démission présumée. C’est le cas de la faillite personnelle ou de l’interdiction de gérer qui frapperaient ce dernier (articles L. 653-2 et L. 653-8 du Code de commerce). Mais aussi, ce peut être l’hypothèse du dirigeant qui viendrait à exercer une profession incompatible avec son mandat (par exemple, l’activité de commissaire aux comptes en ce qui concerne les associations qu’ils contrôlent ou qu’ils ont contrôlées, article L. 822-11 du Code de commerce ; l’activité d’agent sportif s’agissant des associations employant des sportifs contre rémunération ou organisant des manifestations sportives, article L. 222-9 et L. 222-10 du Code du sport).

A côté de ces dispositions légales, les statuts peuvent eux-mêmes énumérer des situations qui entraîneront d’office la démission du dirigeant. Ainsi, par exemple, le fait de ne plus avoir la qualité de sociétaire, d’avoir atteint une certaine limite d’âge ou encore de ne pas se présenter à un nombre prédéfini de réunions du conseil d’administration. Les rédacteurs des statuts veilleront, dans de telles hypothèses, à ne pas oublier de préciser la date d’effet de la démission.

2/ La révocation du dirigeant d’association

2.1/ Révocation et exclusion

Sauf stipulation contraire, un dirigeant d’association est révocable « ad nutum » ce qui signifie que l’association est parfaitement libre de le révoquer à tout moment sans avoir de motif à fournir ni d’indemnité à lui verser (article 2004 du Code civil) et ce, même si le mandat du dirigeant est à durée déterminée. Il faut évidemment se garder de confondre révocation et exclusion de l’association : si la révocation n’entraîne pas en elle-même l’exclusion automatique de l’ancien dirigeant membre, le motif de révocation, s’il est constitutif d’une faute, pourra en revanche servir de base à une procédure disciplinaire d’exclusion.

2.2/ Organe compétent

La révocation « ad nutum » implique le respect de certains principes essentiels fondés sur la protection des intérêts du dirigeant. Au premier chef, la décision de révocation doit ainsi émaner de l’organe qui en a reçu compétence aux termes des statuts. Dans le silence de ces derniers, l’organe investi de ce pouvoir sera celui ayant procédé à la désignation du dirigeant (CA Pau, 1er avril 2003). Très souvent, cette compétence est attribuée à l’assemblée générale, laquelle aura la possibilité de révoquer le dirigeant alors même que la question n’aura pas été inscrite à l’ordre du jour. La décision de révocation devra en revanche être expresse de sorte qu’elle ne pourra, par exemple, résulter du seul refus de l’assemblée de donner quitus au Président.

INCIDENT DE SÉANCE : La révocation peut intervenir en cours d’assemblée, sans inscription à l’ordre du jour, si elle est la conséquence d’un incident survenu pendant la réunion (Cass. 19 janvier 1970). A titre d’exemple, dans un arrêt du 9 mars 2009, la Cour de cassation a précisé que la révocation d’un dirigeant sans inscription préalable à l’ordre du jour de l’assemblée générale est valide lorsqu’elle est l’expression d’un manque de confiance des membres dans leur président, notamment lorsque ce dernier est suspecté de sacrifier l’intérêt de l’association au profit d’un autre groupement dans lequel il est impliqué, et que son attitude devient un obstacle au fonctionnement de celle-ci.

2.3/ Les limites de la révocation « ad nutum »

Si la révocation « ad nutum » n’a pas à être justifiée, elle ne pourra, en revanche, en aucun cas résulter d’un abus de droit (Cass. civ., 1ère, 2 mai 1984) : tel est le cas lorsqu’elle est faite avec mauvaise foi ou encore de façon brutale. De même, la révocation ne doit pas intervenir dans des circonstances injurieuses ou vexatoires à l’égard du dirigeant. Dans ces hypothèses, ce dernier sera en droit de réclamer des dommages-intérêts compte tenu du préjudice subi.

En tout état de cause, les règles de la révocation « ad nutum » s’appliquent bien évidemment par défaut, et il est tout à fait possible d’insérer dans les statuts des clauses établissant des modalités de cette révocation, en prévoyant par exemple l’exigence d’un juste motif ou d’un préavis, ou encore en exigeant des conditions de quorum et de majorité spécifique.

 

Quitterie DUBOUIS-BONNEFOND, avocat au Barreau de Lyon

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