Pas assez représentées dans les instances dirigeantes, pas assez médiatisées, et donc pas assez financées, les sportives françaises souffrent d’inégalités par rapport aux hommes. Najat Vallaud-Belkacem, ministre des droits des femmes, a précisé jeudi les mesures envisagées par le gouvernement pour améliorer cette situation. Elle s’est exprimée à l’occasion des premiers états généraux du sport féminin en équipe, organisés par la ville de Bourges et sa redoutable équipe de basketteuses, du 16 au 17 mai. 

  • Parité dans les instances dirigeantes d’ici 2020

La ministre présentera à la fin juin au conseil des ministres une loi-cadre sur les droits des femmes. S’il est adopté, ce texte obligera les fédérations sportives du pays à respecter la parité hommes-femmes au niveau de leurs comités directeurs. « Nous voulons que tous les sports se donnent les moyens d’attirer autant de filles que de garçons, explique la ministre. Et pour ce faire, une représentation équilibrée dans les instances de gouvernance est un levier important. A priori, la ‘deadline’ finale qui nous semble être la bonne est celles Jeux olympiques 2020. Mais nous espérons quand même que certaines fédérations n’attendront pas pour s’y mettre. »

En cas de réticences, d’éventuelles sanctions sont à l’étude. « A présent, ce qui est imposé aux fédérations pour leurs instances dirigeantes, c’est un objectif de proportionnalité [en fonction du nombre de licenciés selon les sexes], qui n’a pas été respecté par tout le monde, loin s’en faut », déplore Najat Vallaud-Belkacem. D’ores et déjà, on peut noter que quelques disciplines comme la gymnastique et la natation donnent l’exemple en matière de parité.

Au sein d’une fédération sportive, le comité directeur joue un rôle-clé : il contribue à élire le président de la fédération en question. Et là aussi, la question de la parité se pose. Pour l’instant, rares sont les femmes à avoir déjà eu accès à un tel poste. lsabelle Spennato-Lamour, élue en mars à la tête de la Fédération française d’escrime (FFE), fait ainsi figure d’exception. L’épouse de Jean-François Lamour est actuellement la seule femme à présider l’une des 31 fédérations françaises de sports qui participent aux JO.

En 2011, le Sénat dressait un état des lieux, sur plus de cent sports, afin d’illustrer cette sous-représentation : « Les avancées restent très relatives : onze femmes sont aujourd’hui à la tête d’une fédération sportive. Elles représentent 15 % des cadres des fédérations, 15,5 % des conseillers techniques régionaux, 18,3 % des conseillers techniques nationaux, 11,1 % des entraîneurs nationaux et 5 % des DTN. »

  • Du foot et du rugby féminins diffusés en clair

La promotion du sport féminin passe aussi, évidemment, par les médias. Toujours dans le projet de loi-cadre, il est ainsi prévu d’« élargir les pouvoirs du CSA pour qu’il vérifie que chacune des télés respecte l’équité dans les images » représentant des sportives ou des sportifs, explique Najat Vallaud-Belkacem. Une compétence qui ne figure pas, à l’heure actuelle, dans les champs d’attribution du Conseil supérieur de l’audiovisuel.

En concertation avec le ministère des sports – même si Valérie Fourneyron n’a pu se rendre dans le Cher, en raison d’un déplacement à Bruxelles –, Najat Vallaud-Belkacem a également indiqué la volonté gouvernementale d’intégrer des événements de football et de rugby féminins dans la liste française des rendez-vous sportifs considérés d’intérêt public – et donc obligatoirement diffusés en clair sur des chaînes publiques. Avec en ligne de mire les finales de Coupe du monde.

Le gouvernement attend désormais la réponse de la Commission européenne pour incorporer les footballeuses et les rugbywomen dans ce fameux décret TSF (télévision sans frontières) datant de 2004. Le texte, fixé à l’échelle européenne, comporte aujourd’hui 28 événements, dont 5 mixtes et à peine 5 uniquement féminins.

  • Attirer plus de pratiquantes

Enfin, pour développer la pratique du sport féminin, le ministère des droits des femmes souhaiterait que chaque fédération sportive lui transmette, au plus tard à la fin de l’année 2013, « un plan de féminisation ». En France, parmi les personnes à avoir une licence sportive, il n’y a en effet qu’un tiers de femmes.« Il faut que les fédérations imaginent des campagnes de promotion pour les féminines, qu’elles favorisent l’activité des jeunes filles grâce à la formation, qu’elles prévoient pour les arbitres autant de filles que de garçons. Nous avons déjà identifié ces critères, mais nous sommes encore ouverts aux suggestions », précise la ministre. Najat Vallaud-Belkacem ne s’est pas appuyée sur un texte législatif pour demander un tel plan, mais si les fédérations ne répondaient pas à l’appel, elle envisage de geler les sommes versées au nom de la féminisation du sport. « On voudrait conditionner ces subventions, car certaines fédérations les touchent alors qu’elles ne font rien pour », conclut-elle. Entre incitations, obligations et incantations, le sport féminin a encore du chemin à parcourir…

 

 

Adrien Pécout (Bourges- Envoyé spécial) 

source : www.lemonde.fr

 

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Sénat rapport n°650


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