Le Conseil d’Etat apporte un éclairage intéressant sur l’apport du code général de la propriété des personnes publiques (CG3P) de 2007 avec la possibilité de conserver des servitudes conventionnelles de droit privé sur une parcelle devenue du domaine public. Une décision susceptible d’intéresser les associations, lesquelles bénéficient très souvent de la mise à disposition de domaines publics.

Le 1er mai 1881, la commune de Marcillac-la-Croisille avait consenti au grand-père du requérant, dans un acte de vente d’une parcelle correspondant à la place de la mairie, une servitude non aedificandi d’une durée illimitée dans le temps.

En 2004, le maire de la commune a refusé de détruire deux murets qu’il avait érigés en vue de l’aménagement de cette place. Le Tribunal administratif de Limoges, puis la Cour administrative d’appel de Bordeaux ayant successivement rejeté la demande d’annulation de cette décision par le requérant, il s’est alors pourvu en cassation.

Le raisonnement du Conseil d’Etat n’est pas sans intérêt. Il a tout d’abord considéré qu’avant l’entrée en vigueur du CG3P, il résultait des principes de la domanialité publique qu’une servitude conventionnelle de droit privé pouvait être maintenue sur une parcelle appartenant au domaine public à deux conditions. D’une part, qu’elle ait été consentie antérieurement à l’incorporation de cette parcelle dans le domaine public et, d’autre part, qu’elle soit compatible avec son affectation.

Puis, près avoir confirmé l’application de cette jurisprudence, le Conseil d’Etat s’est attaché à vérifier si ces deux conditions étaient remplies. Il a ainsi constaté que cette servitude portait clairement sur l’impossibilité d’édifier une construction permettant de masquer la vue du château ou d’en rendre l’accès plus difficile. Il en a déduit que cette servitude était compatible avec l’affectation comme place publique de la parcelle objet du litige.

Il a donc considéré que cette servitude était toujours invocable.

Néanmoins, il conclut en considérant que les deux murets dont la destruction était demandée étaient d’une hauteur de 50 cm et ne pouvaient avoir pour effet de masquer la vue. Qu’en outre, les problèmes de circulation n’existaient pas puisque ces murets laissaient une voie d’accès supérieure à la largeur réglementaire applicable aux voies de circulation fixée à 5 mètres.

Il en a déduit que le maire de la commune était dès lors fondé à refuser de détruire les murets litigieux.

Cet arrêt permet ainsi de confirmer la validité d’une servitude conventionnelle instaurée sur une parcelle devenue depuis une parcelle relevant du domaine public. La servitude doit toutefois être compatible avec l’affectation de la parcelle.

Les solutions des litiges dépendront dès lors de chaque cas d’espèce.

Anne-Cécile Vivien, avocat associé, Ernst & Young

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Documents joints:

CE 14 décembre 2011, n° 337824



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